C’est à 5 ans que l’artiste a son premier contact avec la gravure dansl’atelier de ses parents James et Mirelle Coignard dite Andelu, peintre etgraveurs. La gravure est une histoire de famille d’artistes. Elle regardait les grands travailler avec le procédé du carborundum convenant parfaitement aux peintres matiéristes comme son père et permettant de créer des multiples sans pour autant se plier à la discipline de la gravure traditionnelle.
Arrivée à Paris en 1987, Emmanuelle vit une première migration fonda- mentale et fondatrice : la rencontre humaine et picturale avec de nouveaux artistes, Hagege, Pincemin, Barcelo, Broto… Elle entame alors un travail de gravure à l’atelier Pasnic : « C’était comme partir à la conquête d’un nouveau monde. Une émulsion interne puissante ! »
Un passage de trois ans à l’Usine Éphémère, au contact d’un collectifd’artistes dotés d’une forte effervescence, constitue pour elle commeun changement d’hémisphère. Son travail se transforme comme sous le coup d’un déclencheur et d’un producteur de nouveauté.
« Lorsque je peins, il s’agit de prendre en compte une globalité. De rassembler mes sens et de laisser surgir mes éléments de mémoire, de désir.Et de faire confiance à cet état où je ne suis plus que le transmetteur de propositions issues de mon inconscient. »
En 30 années de peinture, elle a parcouru de nombreux chemins. Tout d’abord avec un travail abstrait, puis une pein-ture plus suggestive reliée à l’expressionnisme-abstrait ; elle s’intéresse ensuite au figuratif « pour aller chercher la difficulté afin d’éviter la répétition ». Enfin elle se rapproche de l’expressionnisme et du baroque : Goya, Bosch, Titien…Pour sortir des sentiers battus et se détacher de la palette des ocres, oser les couleurs franches : le jaune, le rouge… Rapidement – s’inspirant de lectures des récits mythologiques – elle s’intéresse aux origines et à la puissance desmythes, aux métamorphoses, à la bête humaine… En 2000 elle découvre l’Asie, le Népal, l’Inde : véritable choc decultures et rencontre d’une nouvelle terre de liberté. L’humain trouve alors toute sa place dans son travail, avec desgrands formats, des couleurs primaires et des aplats lisses et brillants. Les expositions ACTE II « D’obscénité et de fu-reur » puis « Made in India », ont constitué pour elle un tournant artistique marqué par des échanges d’une profonde richesse. Face à la toile, toujours l’humain ! Aller chercher des visages, des corps, des objets, des strates, des couches,des juxtaposition de temps. La nature est également un carburant pour son moteur créatif et émotionnel. Elle aime voyager, aller vers des choses qui l’obligent à inventer, errer – physiquement en voyageant mais artistiquement aussi.« Aller vers la perdition, sans avoir peur ».
Parallèlement à ses recherches picturales, elle continue d’expérimenter la gravure à l’atelier Pasnic qui « ouvre le champ des possibles : découpages, collages, résines carborundum, etc.. ». C’est une passerelle entre le dessin et lapeinture, l’expérience est riche de réflexion. Suite à des sessions de travail sur la presse, il lui arrive de regarder sestableaux dans un miroir, pour les voir à l’envers comme une plaque imprimée sur le papier !